Krasnoïarsk, ex-fleuron de l’industrie lourde au coeur de la Sibérie, est en faveur: son mécène, la multinationale Norilsk Nickel, vient de lui offrir une station de ski dernier cri, calquée directement sur les prestigieux sites autrichiens.
Krasnoïarsk s’essaie au ski à l’occidentale pour conquérir les Sibériens.
Située à équidistance -mais à plusieurs milliers de kilomètres- entre l’Europe et l’Asie, cela n’a rien d’évident, en particulier dans la ville de Norilsk, située au-delà du cercle polaire, et où les conditions climatiques sont notoirement difficiles.
Pour plus de 2 milliards de roubles (58 millions d’euros), ce gigantesque groupe minier -il représente près de 2% du PIB du pays et 20% de la production mondiale de nickel- tente de séduire la population locale.
Certes les quelques 15 pistes qu’il a fait tracer à travers pins et bouleaux sur le site de « Bobrovi Log » (la Plaine des Castors), n’offrent qu’un espace limité, sur des collines qui culminent à un peu plus de 500 mètres d’altitude.
Mais la station, ouverte fin décembre et située à 20 minutes de voiture à peine de la ville, a su capter un public jeune et branché, avide de loisirs et de consommation : pour des prix raisonnables, on peut y louer des skis et snowboards du dernier modèle, avant de grimper dans des télésièges ultramodernes et tout confort.
Les responsables sont allés chercher l’inspiration et le matériel en Autriche, leader incontesté des technologies liées au ski, et en Allemagne. Rien ne manque, ratraks, canons à neige, piste à part pour le snowboard.
Même la cuisine autrichienne est à l’honneur : la station a fait appel à un consultant en hôtellerie de Graz pour apprendre à ses cuisiniers l’art de la Schnitzel et de la Sachertorte, lesquels « font fureur auprès des Russes », selon lui.
Sont également prévus une piscine et un parc de loisirs, pour l’heure encore à l’état de chantier. Mais le prix des antiques « isbas », les maisons en bois situées tout près de la station, n’a pas attendu pour flamber.
Au total, le site emploie 750 personnes. Après trois mois d’exploitation, la station n’est pas encore rentable, admet à demi-mot son directeur Igor Ayzenberg. Mais « l’important, c’est le flot », fait-il valoir.
Car Bobrovi Log n’est pas qu’un simple caprice d’oligarque : l’idée en a germé il y a trois ans dans la tête d’Alexandre Khloponine, gouverneur de la région de Krasnoïarsk et lui-même ancien PDG de Norilsk Nickel.
Pour ce politique, à qui l’on prête des ambitions présidentielles en dépit de son jeune âge (42 ans), la région de Krasnoïark – environ un million d’habitants dans la ville, et à peine trois millions dispersés sur un territoire vaste comme quatre fois la France- doit absolument parvenir à attirer de jeunes talents et diversifier son économie au-delà de la seule exploitation des matières premières.
Située à équidistance -mais à plusieurs milliers de kilomètres- entre l’Europe et l’Asie, cela n’a rien d’évident, en particulier dans la ville de Norilsk, située au-delà du cercle polaire, et où les conditions climatiques sont notoirement difficiles.
D’où la nécessité de construire ce qu’il appelle les « infrastructures sociales » de la compagnie. La station de ski, toute rutilante qu’elle soit, en fait partie.
« Il faut que les gens gagnent de l’argent, il faut construire des maisons, créer une forte motivation pour ceux qui veulent travailler dans la région », avec des lieux culturels, des écoles… souligne-t-il lors d’une rencontre avec des journalistes.
« Si nous ne résolvons pas le problème démographique d’ici 15 ans, nous devrons rouvrir les camps de travail pour boucher les trous… », ironise-t-il.
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