Et vendredi, la chaîne télévisée NTV, où rien n’est fait sans le sceau d’approbation du pouvoir, va diffuser une « enquête » pour révéler « comment l’épouse du maire est devenue la femme la plus riche de Russie » et « comment se répartissent les affaires les plus juteuses de la capitale ».

Iouri Loujkov, maire de Moscou depuis 18 ans, n’est pas en odeur de sainteté au Kremlin qui multiplie depuis l’été les critiques à son égard, mais l’inoxydable patron de la capitale russe organise une résistance efficace.

A bientôt 74 ans, avec une épouse milliardaire grâce aux chantiers qu’elle réalise à Moscou et un mandat qui s’achève en juin 2011, M. Loujkov aurait du choisir de faire profil bas avant de quitter la scène politique.

A chaque critique, Iouri Loujkov réplique, quitte à fâcher le président Dmitri Medvedev. En politique expérimenté, le maire de Moscou prend cependant soin de ne pas s’alliéner le Premier ministre Vladimir Poutine.

Le 10 août, alors que Moscou étouffe dans la canicule et la fumée des incendies de forêt dans la région, une « source » au sein de la présidence russe se répand dans les médias pour reprocher à Loujkov de ne pas avoir interrompu « plus tôt » ses vacances.

Le maire réplique le 31 août à l’antenne de la télévision municipale, assurant bénéficier du soutien de M. Poutine face au « coup de pied de l’administration présidentielle ».
Deux jours plus tard, Vladislav Sourkov, chef-adjoint de l’administration présidentielle, estime qu’aucun dirigeant de région en Russie ne doit être âgé de plus de 70 ans. En clair: les jours du maire de Moscou sont comptés.

M. Loujkov ne plie pas pour autant et s’est fendu lundi dans le quotidien Rossiskaïa Gazeta d’un plaidoyer pour la construction d’un tronçon d’autoroute à travers la forêt de Khimki, dont le chantier, autorisé par M. Poutine, a été gelé par M. Medvedev face à une montée de la contestation.

« Une décision doit être claire, uniforme et irrévocable. Les discussions du type ‘parlons encore cinq ans et ne faisons rien’ ne sont rien d’autre que du bavardage », écrit M. Loujkov.

« La modernisation passe par des choix, par des décisions et des priorités (…), elle n’aura pas lieu si l’on s’arrête en chemin », poursuit-il, une critique à peine voilée visant M. Medvedev qui se pose en chantre de la modernisation de la Russie.

Le Kremlin, par le biais d’une source anonyme, ne mâchait plus ses mots mercredi: « Certains responsables de la capitale veulent opposer le président et le Premier ministre (…); de telles tentatives ne resteront pas sans une réponse appropriée ».

Et vendredi, la chaîne télévisée NTV, où rien n’est fait sans le sceau d’approbation du pouvoir, va diffuser une « enquête » pour révéler « comment l’épouse du maire est devenue la femme la plus riche de Russie » et « comment se répartissent les affaires les plus juteuses de la capitale ».

Si le Kremlin aimerait voir partir Loujkov, les observateurs de la vie politique russe estiment que Vladimir Poutine compte encore sur le maire et sa mainmise sur Moscou en vue des législatives de la fin 2011 et de la présidentielle du printemps 2012.

« Pourquoi Poutine se débarrasserait-il maintenant de Loujkov qui le sert en tout bien tout honneur depuis de longues années et qui s’assure toujours que les résultats des élections soient ‘bons' », estime Alexandre Rykline, du mouvement d’opposition Solidarnost et rédacteur en chef du site ej.ru.

Le maire de Moscou pourrait donc même obtenir un sursis et se maintenir à son poste jusqu’à l’été 2012, après quoi il pourra profiter d’une retraite dorée.