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L’historien byzantin Théophile Simocatta rapporte qu’en 591 en Thrace, les Grecs firent prisonniers trois Slaves sans armes mais munis d’instruments de musique qui se présentèrent ainsi:

«Nous sommes les Slaves et vivons sur le bord extrême de l’Océan Occidental (mer Baltique). Nous jouons sur ces lyres (gousli) car nous ne savons pas jouer de la trompe. Comme nous ne savons rien de la guerre, nous trouvons dans la musique notre meilleure occupation».

Gousli vient du mot slavon gousti qui veut dire tinter, résonner, bourdonner; la gouslia était une corde en boyau, comme l’instrument en possède plusieurs, le terme s’est maintenu au pluriel pour le désigner.

Apparemment tout instrument à cordes était nommé ainsi en Russie.

Les plus anciens gousliars ou gouslistes étaient des chanteurs mendiants, bardes nomades souvent aveugles.

Les ballades, les bylines et les chants épiques furent ensuite accompagnés aux gousli par les skomorokhi légendaires tels Boïan, Sadko, ou Kircha Danilov, Dobrynia Nikitine et que Glinka (« Rouslan et Lioudmila »), Rimski-Korsakov (« Sadko ») et Borodine (« La Symphonie des Preux ») campèrent dans leurs opéras.

Bien des contes, des proverbes, des descriptions littéraires, des vers illustres et des chants mentionnent les gousli dont il y a trois types:
Les gousli sonores ou « en forme d’aile » se présentent comme un tiroir au fond creusé en érable blanc, bouleau, saule ou platane (L = 550-650, l = 200-300, h = 30-40 mm), à la table plane en sapin, munies de 4 à 15 cordes en crin, boyau ou plus tard cuivre, laiton ou acier. On a retrouvé et restauré cinq gousli de ce type datant du XIIIe siècle. Elles furent construites en famille dès le début du XIXe siècle grâce à Smolenski, Privalov, Nalimov et Andréïev.

Les gousii psaltyr ou « en forme de heaume« , similaire au psaltérion moyenâgeux, à la caisse importante (L = 800-1000, l = 450-500, h = 100-120 mm), elles sont pourvues de onze à trente-six cordes, cette fois toutes en boyau; accord diatonique. Seul instrument russe à ne pas avoir été visé par les interdits du clergé et des oukazes, car il rappelait le psaltérion biblique du Roi David. Des gousli tchouvaches furent re- construites en 1930 par G. Lioubimov et dotées d’un accord chromatique leur permettant de jouer avec son ensemble de domras à quatre cordes.

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Ces deux types d’instrument, que d’autres peuples possèdent (kantele de Carélie, kankles, kannel, kokle des Pays Baltes, goslia tatare, etc.), reposent sur les genoux ou sont tenus contre la poitrine ou enfin retenus par une sangle passée autour du cou.

Les cordes qui ne sont pas étouffées par les doigts posés dessus laissent entendre la suite des notes qui composent la mélodie, la variation ou les accords d’accompagnement, exécutée par l’autre main.

Les gousli de table ou « sur pieds« , « rectangulaires » ou encore « gousli des popes » car ceux-ci les préféraient aux clavicordes, épinettes ou clavecins européens du XVIIe siècle. D’une longueur moyenne atteignant 1500 mm sur 500 de large, le tiroir est haut de 200 mm. Le bois utilisé est toujours de l’épicéa. Elles apparurent au tout début du XVIIe siècle. V.

Troutovski publia les premiers recueils de chansons russes accompagnées justement par ce type de gousli (1776-1795). Les méthodes apparaissent dès 1802.

Perfectionnées en 1908 par V. Andréïev, A. Herhens, S. Nalimov et A. Hartman, en 1913 par N. Fomine, elles possèdent jusqu’à quatre-vingt quatre cordes métalliques et sont agrémentées d’un clavier servant d’étouffoir.

Par son intensité sonore, son timbre riche, coloré, ses procédés de jeu variés (pinces, glissando, trémolo, briatsanié et jeu à l’aide d’un plectre en cuir), les gousli ont traversé les siècles, séduisant d’illustres amateurs tels le poète G. Derjavine, le compositeur O. Kozlovski, le folkloriste V. Troutovski. Les gouslistes virtuoses contemporains en Russie ont pour nom: V. Gorodovskaïa, N. Tchékanova, O. Nikitina, V. Titov, D. Lojkine. Ceux de jadis: M. Pomérantsev, O. Smolenski, V. Danilov, N. Privalov.

Les Gousli

par | 15 Sep 2011 | 0 commentaires

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