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Serguiev Possad : le monastère de la Trinité-Saint-Serge

Depuis des siècles, le nom de Serguiev-Possad (ex-Zagorsk) est synonyme de culture, d’art et de spiritualité dans toute la Russie. La ville doit son nom à saint Serge de Radonège qui s’installa dans cette région couverte de forêts au XIVe siècle. Cet homme remarquable, chef spirituel du peuple russe, ardent défenseur de sa patrie et conseiller des princes, est le patron de la Russie. Dans sa retraite, il attira rapidement une communauté d’ermites et de paysans qui s’organisa en monastère et parvint, non sans mal, à le convaincre d’en prendre la direction.

sergiev_posad_1.jpgEn 1920 un décret de Lénine fit de Zagorsk une ville-musée. Elle renferme un merveilleux ensemble architectural, de riches collections d’icônes et d’objets du culte. En outre Zagorsk est une forteresse qui s’est rendue célèbre en soutenant un siège héroïque de seize mois. Au début du XVIIe siècle l’invasion polonaise mit la Russie à feu et à sang. Les tours des forteresses s’écroulaient dans des nuages de fumée, les rues des villes incendiées (des villes de l’Anneau d’Or) étaient inondées de sang. Seul et minuscule îlot de résistance. la forteresse du monastère de la Trinité-Saint-Serge fit front. Elle était défendue essentiellement par les paysans des villages avoisinants. Les assaillants étaient en nombre dix fois et même à un certain moment vingt fois supérieur. Tous les défenseurs de la place forte et la Russie entière comprenaient que «si le monastère de la Trinité est pris. c’est la fin de la Russie». Ils vainquirent. Les armées de l’orgueilleux Sapieha abandonnèrent honteusement les lieux du combat.

L’enceinte du monastère édifiée en 1540-1550 sur le modèle de celle de Kitaï-Gorod (la «ville chinoise») à Moscou n’était pas haute. Après le siège on rehaussa les murs, on refit les tours qui avaient été très endommagées. En tout on en compte onze dont deux d’entrée. Trois des quatre tours rondes d’angle, les tours Piatnitskaia. Vodianaïa et Plotnitchia, ont conservé leur aspect initial. La quatrième, appelée Outitchia («du Canard»). fut dotée plus tard d’un faîte élégant en style baroque «Narychkine». La Belle tour. traversée par la Porte-d’Or date du début du siècle dernier.

L’ensemble du monastère de la Trinité-Saint-Serge est un monument d’architecture russe unique dans son genre. Il ne fut pas construit selon un plan unique et les édifices qui le constituent furent élevés l’un après l’autre au cours de plusieurs siècles. Chaque époque y laissa son apport, modifiant souvent ce qui existait déjà. On est étonné par le doigté avec lequel les architectes déterminaient les dimensions et le style de chaque bâtiment nouveau qu’ils ajoutaient. Ainsi, l’harmonie qui émane de ce bel ensemble est à la mesure du talent de nombreuses générations d’architectes russes.

A l’intérieur de la Laure la coupole et les toits de la cathédrale de la Trinité sont recouverts d’or rouge et brillent au soleil. C’est le premier monument de la Russie fondé en l’honneur de saint Serge de Radonèje l’année de sa canonisation en 1422. Bartholomé, frère Serge au monastère, était le fils d’un riche seigneur de Rostov qui avait reçu du grand-prince de Moscou la petite ville de Radonèje en apanage, d’où son nom. Frère Serge fut un grand homme politique qui sut animer la lutte contre les envahisseurs tataro-mongols. L’armée du peuple russe qui mis en déroute le khan Mamaïen 1580 s’était formée au pied des murs du monastère. Frère Serge ne se contenta pas d’encourager les soldats venus de Moscou. Il convainquit d’autres princes à apanage de s’unir sous l’étendard de Dimitri Donskoï. Sous son influence deux anciens boyards de Briansk, deux guerriers accomplis, Pérésvet et Osliabia, qui étaient entrés dans les ordres accomplirent des exploits et moururent pour la patrie. «Ils étaient, disent les chroniques, doués pour l’art de la guerre autant que pleins de courage et de bravoure». Les cendres de saint Serge sont enterrées dans la cathédrale de la Trinité et le poêle avec son portrait est conservé au musée. Serge était un homme de grande taille et large d’épaules. Il avait des cheveux drus et qui restèrent jusqu’à la fin de sa vie, signe de force et de santé. Dans l’iconostase figurent des œuvres de Roubliov et de ses compagnons. C’est ici que Roubliov peignit sa célèbre Trinité dont l’original se trouve maintenant à la Galerie Trétiakov. On peut en voir une très belle copie dans l’iconostase de la cathédrale.

La cathédrale de la Trinité est le premier édifice du monastère. C’est un des rares monuments qui nous soient parvenus édifiés dans le style dit «de l’architecture russe» remontant à la période où Moscou réunissait autour de lui les principautés pour former un État centralisé et où, en même temps, s’élaboraient les bases d’une culture nationale panrusse.

La deuxième grande église ancienne, celle de la Pentecôte fut construite en brique par des maçons de Pskov en 1476. Son sommet est inhabituel: sous la coupole se trouve un clocher. Les églises de ce type étaient dites «sous les cloches». Une description datant de 1641 a conservé le nom et les caractéristiques de chaque cloche.

Les maçons d’Ivan le Terrible commencèrent à construire la grande cathédrale de la Dormition en 1559. Cette cathédrale à une coupole était destinée à devenir le sanctuaire principal de la Laure. Elle fut achevée en 1584 sous le tsar Féodor Ivanovitch. Elle se distingue par la simplicité austère de ses lignes extérieures. A l’intérieur elle possède une énorme iconostase sculptée derrière laquelle se trouvent de hautes plates-formes pour le chœur. Des contemporains ont raconté que le chœur semblait composé de «voix célestes». Dans l’iconostase figurent des travaux de Simon Ouchakov. Des lustres en cuivre très travaillés sont suspendus sous les coupoles. Tous les murs et les voûtes sont recouverts de fresques exécutées pendant l’été 1684 par 35 peintres sous la direction de Dimitri Grigoriev. La liste des artistes est inscrite sur le mur ouest de la cathédrale, sous la bordure de draperies peintes. Le tombeau des Godounov dans l’angle nord-ouest de la cathédrale de la Dormition est une petite construction modeste.Le tsar Boris Godounov n’a pas laissé un bon souvenir de son règne. Sa femme, la fille du cruel Maliouta Skouratov, non plus. Leur fils était un personnage falot et fut vite oublié. Par contre la princesse Xénia est toujours mentionnée avec gratitude. C’était une jeune fille d’une beauté exceptionnelle, bonne et généreuse, très douée pour les travaux d’aiguille à une époque où ce talent était hautement apprécié. Un dessus d’autel fait par Xénia Godounova en 1601 est exposé au musée. Il représente la Vierge, le Christ et saint Jean-Baptiste avec Serge de Radonèje et Nikon faisant leurs dévotions. La broderie exécutée en soie, en fil d’or et d’argent et en pierres précieuses sur du velours est d’une grande finesse. Les assassins de sa mère et de son frère n’épargnèrent Xénia que pour la livrer en otage au Faux Dimitri. Après quoi on l’expédia dans un couvent éloigné puis dans un autre. Devenue sœur Olga. elle affronta avec courage tous ses malheurs. L’image de Xénia Godounova et le récit tragique de sa vie ont été enregistrés par les chroniques et la tradition orale et toujours avec la sympathie du conteur. Chacun la plaignait, comme la victime innocente de son «monstre de père».De l’autre côté de cette même façade ouest un petit bâtiment nous délivre de l’impression sinistre produite par le tombeau des Godounov. C’est une petite chapelle de la fin du XVIIe siècle à l’aspect joyeux et semblable à un jouet sculpté et peint. Cette chapelle Nadkladeznaïa («sur le puits») est en style «Narychkine». Elle est constituée de trois prismes octogonaux (vozmérik) sur une base carrée (tchétvérik).

sergiev_posad_2.jpgUne deuxième chapelle Nadkladeznaïa (Piatnitskaïa). elle aussi de la fin du XVIIe, se dresse sur la rive, hors des murs de la Laure à l’est des églises de la Présentation et Piatnitskaïa (d’où son nom). Cette chapelle a perdu nombre d’éléments de sa décoration, elle s’est enfoncée dans la terre, mais ce qu’il reste de son portail sculpté et des encadrements de fenêtres, est suffisant pour nous donner une idée de la beauté de ce petit bâtiment.

Le Réfectoire, vieux de trois siècles, fut reconstruit entre 1686 et 1692. L’édifice posé sur un soubassement élevé est entouré d’un promenoir ouvert, d’un large escalier. Il est décoré de demi-colonnes sculptées, de coquilles, de grappes de raisin stylisées: ses murs sont peints en damier de rouge, jaune, bleu et vert. A l’intérieur le plafond de la salle est en voûte d’arête, ce qui était au XVIIe siècle une réalisation technique d’avant-garde qui ne sera égalée que beaucoup plus tard. Les peintures sur les murs sont plus tardives: elles datent du XIXe , mais sont intéressantes pour leur époque. L’église partagée en deux par une grille dorée en fer forgé a une iconostase sculptée très belle ainsi qu’un plancher en jaspe marron rouge.

L’Hôpital et l’église de Zossima-et-Savvati. la seule en pyramide dans le monastère, constituent un ensemble architectural typique du début du XVIIe siècle. Il y a peu de temps cette église était cachée par des maisons d’habitation et tombait en ruines. Un architecte- restaurateur plein de talent. I. Trofimov. qui travailla longtemps au monastère, lui rendit sa beauté première, ses ornements de carreaux de faïence et sa pyramide élancée. Maintenant c’est une des parties les plus pittoresques du monastère.

L’agencement complexe des parties de l’Hôpital poursuit le désir de produire le plus bel effet lorsque l’ensemble est vu depuis la place située devant la cathédrale de la Trinité. Ainsi, les loges nord et sud flanquant l’église sont de différentes dimensions, les ailes droite et gauche présentent des décors dont l’opulence varie nettement. les fenêtres des absides de l’église sont percées d’une manière asymétrique et se rapprochent du côté de la cathédrale de la Trinité.

L’église dessus-de-porte de Saint-Jean-Baptiste construite par une famille de riches marchands, les Stroganov. en 1693-1699. est elle aussi typique du XVIIe. Elle a perdu quatre de ses coupoles. mais n’en demeure pas moins un monument intéressant. Son décor rappelle celui du Réfectoire.

Le palais Tchertogui qui servait de résidence de passage au tsar Alexis Mikhaïlovitch est de la même époque. Le tsar se rendait souvent au monastère de la Trinité-Saint-Serge, lieu saint fameux dans toute la Moscovie. avec sa suite qui comptait plus de cinq cents personnes. Il fallait loger tout ce monde. C’est pourquoi le palais Tchertogui est un bâtiment vaste et de formes simples qui porte encore partiellement sa décoration de carreaux de faïence. A l’intérieur se trouvent deux magnifiques poêles en faïence qui sont sans doute les plus beaux de tous ceux qui se sont conservés.
Le plan du palais Tchertogui relève de cette époque de transition entre l’agencement libre des édifices des XVIe et XVIIe siècles et les principes de l’architecture sévèrement régulière. Le mur intérieur qui partage le palais dans le sens de la longueur, le divise en deux rangées de pièces dont les portes s’ouvrent sur une seule ligne. annonçant ainsi les fameuses enfilades que nous verrons aménager dans les palais du siècle suivant.

Les Appartements du métropolite sont un échantillon du style de trois siècles différents. Vu du nord, le bâtiment semble avoir un étage. En fait il a encore un niveau creusé de plain-pied dans la colline et plus ancien, datant du XVIe siècle. L’étage moyen date du XVIIe: le dernier étage et tous les éléments du décor ont été achevés en même temps que le monastère, vers le milieu du XVIIIe siècle.

La petite église de Mikheïev, située tout près du Réfectoire, retient l’attention par son aspect original et pas seulement par effet de contraste avec son voisin. Même un édifice de deuxième ordre peut avoir son charme quand il est l’œuvre d’un homme de talent.L’accès au monastère se faisait par l’entrée principale de la tour des Pèlerins (sur la façade nord de l’enceinte). En 1745 les bâtiments qui étaient en face de la tour des Pèlerins et qui avaient été endommagés par un incendie furent détruits. Ainsi le passage fut libéré pour permettre au flot des pèlerins d’accéder facilement à la cathédrale de la Dormition et au tombeau de saint Serge.C’est à cette période également que l’on entreprit la construction de l’église de la Vierge-de-Smolensk sous la direction de Dimitri Oukhtomski qui fonda par la suite la première école d’architectes de Russie d’où sortirent Blank (l’assistant de Rastrelli) et Kazakov… L’église de la Vierge-de-Smolensk (dite aussi Odigitria) est une des premières réalisations du jeune Oukhtomski. C’est un bâtiment élégant et original tant par ses formes que son décor en baroque élisabéthain. C’est un prisme octogonal au faces alternativement concaves et convexes. Il est posé sur un petit socle en pierre blanche et entouré de quatre perrons. De larges escaliers d’apparat avec des balustrades en pierre sculptée y conduisent. Trois portes identiques et la niche de l’autel ouvrent sur les perrons. La coupole à huit faces supporte un lanterneau percé de petites fenêtres à arcades: ce dernier est coiffé d’une petite coupole avec une croix sur un croissant de lune qui symbolise la victoire sur les Turcs (tout le XVIIIe siècle est marqué par la lutte contre la Turquie musulmane). L’église de la Vierge-de-Smolensk a été défigurée par des ajouts et des remaniements et pendant longtemps le nom de son architecte resta inconnu. D’après la légende la construction de l’église serait liée au mariage secret de l’impératrice Elisabeth avec Alexis Razoumovski. un chanteur de la cour. Longtemps on attribua cet édifice à Rastrelli. Mais un architecte-restaurateur. B. Komarov. établit que c’est l’œuvre de D. Oukhtomski. C’est ce même Oukhtomski qui paracheva l’ensemble de la Laure de la Trinité-Saint-Serge en le dotant d’un majestueux clocher, un des plus beaux de toute la Russie. Zagorsk sans la ligne verticale de ce clocher est inconcevable.

Où se loger à Serguiev-Possad ?

FOX HOUSE
Prospekt Krasnoy Armii, 96
+7 496 547 69 69
www.foxhousehostel.ru

TSARSKAYA DEREVNIA
Mitkina ulitsa 14/2
+7 496 547 53 92
www.imperial-village.ru

Où est située la ville de Serguiev-Possad ?



 

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par | 1 Jan 2000 | 0 commentaires

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