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Balzac à Saint-Pétersbourg

Dans un quartier résidentiel de Pétersbourg, au 16, rue Millionaïa, se trouvait un meublé tenu par madame Tardiff, qui accueillit en 1843 un pensionnaire, un « certain français, au nom de famille compliqué, accompagné d’un titre : homme de lettres. C’est ainsi que le Bulletin pour les gens du monde annonça l’arrivée à Saint-Pétersbourg en juillet 1843 d’Honoré de Balzac, qui y restera neuf semaines. Le meublé de madame Tardiff avait le mérite d’être situé non loin de la maison Koutaïssoff, résidence de madame Eva Hanska, au 27, rue Millionnaïa.

« On dit qu’il est venu chez nous non pour ses activités littéraires, mais pour rendre visite à sa fiancée », écrira un autre journal pétersbourgeois, l’Abeille du Nord. Depuis leur dernière rencontre à Vienne, huit ans s’étaient écoulés avant que madame Hanska accepte enfin que son « fiancé » vienne la voir dans la capitale impériale. Cette riche comtesse, devenue veuve, devait s’y rendre pour régler la
succession de son défunt mari.

Balzac partit pour Pétersbourg un espoir au cœur : que madame Hanska tienne enfin la promesse de l’épouser. Pour parvenir à son but, il était prêt à tout : « Je deviendrai russe, si vous n’y voyez pas d’obstacle. » Ce ne furent pas les obstacles qui manquèrent. Comme le remarqua le secrétaire de l’ambassade russe à Paris, Victor Balabine : « II n’a pas le sou, donc il va en Russie ; il va en Russie, donc il n’a pas le sou. » En effet, l’argent faisait défaut à Balzac, mais cela ne l’empêcha nullement de retenir « la meilleure cabine sur le pont » à bord du paquebot à vapeur Devonshire. Pour embarquer à Dunkerque le 21 juillet 1843, Balzac s’était au préalable rendu à l’ambassade russe. La Russie avait alors une ambassade à Paris, mais pas d’ambassadeur, seulement un chargé d’affaires, car Nicolas Ier jugeait le régime de Louis-Philippe illégitime. Il y fut reçu par le même Victor Balabine, qui laissera ce portrait de lui : « Un petit homme gros, gras, figure de panetier, tournure de savetier, envergure de tonnelier, allure de bonnetier, mise de cabaretier. »

Pourtant, la Russie aimait cet écrivain « qui a le mieux décrit le sentiment des femmes », et dont les œuvres « étaient connues presque par cœur de tous les amateurs. » Parmi eux se trouvait Fédor Dostoïevski, qui, à seize ans, avait lu « presque tout Balzac. » C’est même avec lui qu’il est entré en littérature, en traduisant en russe « d’un seul trait, en deux semaines et demie, pendant les fêtes de Noël », son Eugénie Grandet. Balzac était si populaire que l’on dit même qu’un coiffeur à la mode de Saint-Pétersbourg gardait toujours un de ses livres ouvert sur sa table de travail : il y trouvait des modèles de coiffure pour ses clientes !

Et pourtant Balzac fut étonné que personne ne cherchât particulièrement à le voir. Cette réserve était en réalité facile à comprendre et lui-même l’a bien senti : « J’ai reçu le soufflet qui était destiné à Custine qui, après avoir séjourné en Russie, a publié son livre La Russie en ]830, où il parle, comme d’autres touristes-écrivains pour la plupart, à l’aveuglette ou injustement de choses graves. » A son retour, dans ses lettres à madame Hanska, Balzac aimera évoquer les quais de la Neva, le palais d’Hiver, l’Ermitage… et un petit square, lieu préféré de leurs promenades « en amoureux », devant le pont Troïtski, où poussaient à l’époque quelques « balais », qui « nourrissaient l’espoir de devenir un jour des arbres. » Quant à l’immeuble de madame Tardiff, il accueille toujours les Français : endommagée pendant la Deuxième Guerre mondiale, la maison fut complètement transformée, donnant naissance à deux bâtiments, dont l’un abrite le Consulat de France.

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par | 10 Mai 2000 | 0 commentaires

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